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La Clairière Catholique

27 avril 2009

PRIERE ET APOSTOLAT

Fréquenter Notre-Seigneur, lui parler, se laisser influencer et convertir par lui, c’est éprouver les mêmes sentiments, partager les mêmes pensées, faire nôtres ses projets. Or, il est un projet qui a dominé sa vie : la Rédemption. Désirer ardemment que tous les hommes bénéficient de cette rédemption, en un mot être apôtre, est le signe clair d’une prière authentique : « Ne me fais pas croire que tu prends soin de ta vie intérieure si tu ne fais pas un apostolat intense, ininterrompu : Notre Seigneur (et tu m’assures que tu le fréquentes) veut que tous les hommes soient sauvés » (Sillon, 197).

En effet, comment ne pas entendre résonner au plus profond de notre âme ces paroles de Notre-Seigneur : « A la vue des foules il en eut pitié, car ces gens étaient las et prostrés comme des brebis qui n’ont pas de berger. Alors il dit à ses disciples : ‘la moisson est abondante mais les ouvriers peu nombreux ; priez donc le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers à sa moisson’ » (Mt 9,36-37).

La prière authentiquement chrétienne, c’est-à-dire liée au Christ, ne peut qu’élargir notre âme, nous faire embrasser du regard ces foules qui ont faim et soif de Dieu. Notre vie intérieure ne peut se cultiver en vase clos comme une orchidée dans une serre chaude. Notre prière concerne notre conversion, mais aussi celle des autres pécheurs comme nous, la fidélité de chacun à sa vocation spécifique, les besoins de l’Eglise, les personnes qui nous entourent, notre famille, les collègues de travail, les amis, les voisins… En un mot, la prière nous mettra devant nos responsabilités apostoliques et nous aidera à les assumer.

« Il est impossible de s’engager dans l’apostolat direct si l’on n’est pas une âme de prière. Nous devons être conscients d’être un avec le Christ, comme lui était conscient d’être un avec son Père. Nous devons devenir saints, non pas pour nous sentir saints, mais parce que le Christ doit pouvoir vivre pleinement en nous. (…) La prière élargit le cœur jusqu’à ce qu’il soit capable de contenir le don que Dieu nous fait de lui-même. Demandez et cherchez, et votre cœur s’agrandira jusqu’à pouvoir l’accueillir et le faire vôtre. » (Mère Teresa de Calcutta, citée par Malcolm Mudgerige dans Mère Teresa)

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4 avril 2009

LE PECHE ET LA LIBERTE

Ne croyons pas que le péché soit l’exercice illégitime de la liberté : le péché tue la liberté, car la liberté est originairement et essentiellement liée à l’amour, nous l’avons vu. Ne raisonnons pas en philosophes mais en chrétiens. La liberté n’est pas le choix entre le bien et le mal ; elle disparaît avec le choix du mal. Par exemple, avant de mentir, je suis libre ; si je dis la vérité, je reste libre ; si je mens, je suis enchaîné à mon mensonge.

Et ainsi de tous les autres péchés.

En quittant la maison paternelle, le cadet n’emporte  pas avec lui sa liberté. Il en emporte le cadavre. Il en fera la triste expérience, d’abord dans l’ecoeurement de sa débauche, puis dans les affres de la famine. Sa liberté est morte. Lui, si fier d’avoir conquis sa liberté, il sera réduit à se mettre au service d’un païen. Et lui, Juif, devra prendre soins d’animaux impurs. Il devra tous les matins balayer une porcherie. Jésus le dira en clair, en employant la formule solennelle : En vérité, en vérité je vous le dis : quiconque commet le péché est esclave du péché

Notre langue française possède une expression d’une haute vérité : « mal, on s’abandonne. Le pécheur suit la pente de ses passions, il n’     a qu’à se laisser tomber sur soi.

La liberté de faire le mal n’est qu’une caricature de la liberté. L’homme se livrer au mal ». Tandis que la vertu signifie étymologiquement virtus, le courage, la force, la virilité, et qu’on l’accomplit effectivement au prix d’un effort. Au contraire, on se livre au se lie nécessairement à l’objet de son amour. S’il aime Dieu et ses frères, il se lie par un attachement qui l’ennoblit et exalte sa liberté. S’il n’obéit qu’à l’amour de soi, il se lie par des attaches qui l’avilissent et stérilisent sa liberté. Ou l’attachement du travailleur à une tache qui accroît sa propre valeur ou l’attachement de l’avare à l’argent qui l’asservit ; ou l’amour désintéressé du bien commun qui grandit un homme ou les intrigues de l’amour de l’ambitieux, prisonnier de ceux qui ménagent ses intérêts ; ou l’attachement du mari aux affections de son foyer qui le soutiennent et le fortifient ou l’attachement de l’époux infidèle à celle qui exige de lui la maîtrise totale de son cœur, de son temps, de sa fortune, et si elle le peut, de son nom. Servus est peccati, il est esclave du péché

Et la loi de l’accélération se vérifie en morale comme en physique ; plus la chute se prolonge, plus elle se fait rapide et profonde. En vain le pécheur se fixerait-il des limites qu’il ne dépassera pas. Quelle que soit la passion à laquelle il cède, à peine rassasié, celle-ci réclame de nouvelles satisfactions et plus complètes. Remarquez que, dans la vertu, nous nous élevons moins haut que nous ne l’espérions. Au contraire, dans le péché on descend toujours plus bas qu’on ne l’avait prévu. Nous restons toujours en-deçà de ce que nous voulions réaliser ; et  nous allons toujours au-delà du mal que nous croyons pouvoir nous permettre. Il y a des limites à la sainteté. Il n’y en a  pas au péché Le pécheur a aliéné sa liberté.

Le péché qui pervertit le cœur n’en change pas la nature. Le cœur de l’homme reste infini dans ses désirs. Créé pour aimer Dieu par-dessus tout, l’objet de sa passion peut changer, mais non pas sa façon d’aimer. Il aimera infiniment, il adorera, et ce n’est plus Dieu, hélas, c’est une idole. S’étant détaché de Dieu il transporte les sublimités de ses élans sur la passion à laquelle il s’enchaîne et s’asservit, si bien, qu’il en vient à pécher par habitude, sans goût, parce que c’est le jour, parce que c’est l’heure, parce que c’est l’occasion. Il est au service d’un maître qui ne paye pas.

C’est bien cet état de servitude que le divin paraboliste a voulu mettre en relief, en imaginant qu’une famine éclate dans le pays où se trouvait le jeune dissipateur. Il n’y a plus d’eau dans les torrents, l’herbe est brûlée, les moissons périssent, les arbres ne donnent plus de fruit, le pain se fait rare, il est hors de prix. Et il commença à sentir le besoin. Il alla donc prendre du service chez un des habitants de cette contrée qui l’envoya dans ses terres pour garder les pourceaux. Il aurait bien voulu apaiser sa faim avec les caroubes que mangeaient les porcs, mais personne ne lui en donnant.

Les critiques incapables de respecter un chef d’œuvre, trouvent ces traits forcés, invraisemblables. Quel valet de ferme, disent-ils, n’aurait pas, en pareil cas, soustrait une poignée de fèves à la ration des pourceaux afin de s’en nourrir lui-même ? Cela ne fait aucun doute ! Mais c’est passer à coté de l’intention du narrateur. Jésus veut nous faire toucher du doigt l’horrible solitude du pécheur. Il est tombé au-dessous des animaux qu’il surveille. Le propriétaire s’inquiète de servir ses porcs, mais personne ne s’occupe de lui, personne ne songerait à lui donner de quoi manger. Pour le marchand de pourceaux la graisse de ses animaux est plus précieuse que la vie de son domestique. Le prodigue est abandonné de tout le monde.

GEORGES CHEVROT , L’ENFANT PRODIGUE

21 mars 2009

L'INTIMITE AVEC JESUS-CHRIST

              Mettons-nous dans l’esprit que c’est Jésus-Christ qui nous convertit. C’est lui qui nous retourne, nous change et nous transforme. Se convertir, ce n’est pas d’abord se détacher du mal, du mal qui nous attire, du mal qui nous procure un bienfait, éphémère, trompeur… mais un bonheur tout de même, sans quoi on ne pécherait pas. Se convertir c’est d’abord se tourner vers Jésus-Christ ; se retourner sans cesse vers lui, trouver en lui une joie meilleure, plus haute, plus profonde qui nous détourne du mal.

            L’erreur de méthode consiste à mettre l’accent sur le renoncement. Il est indispensable, en effet. Le seigneur l’a dit assez clairement. Mais on admettra que renoncer pour se renoncer serait une absurdité. On ne peut raisonnablement vouloir le moins que parce qu’on possède le plus. Je peux dire non à mon orgueil, à l’argent, aux plaisirs… parce que j’ai dit oui à  Jésus, parce que j’ai découvert en Jésus une autre et une plus grande richesse.

            C’est Jésus qui nous détourne du mal. Que je comprenne seulement son amour pour moi, que je me laisse gagner par son amour… jusqu’à ne faire qu’un avec lui. Alors, non pas tout seul mais tous les deux ensemble : moi le tenant par la main, lui me tirant par le bras, je pourrai me détourner du péché, me détacher du mal.

            Car voici le terme même de la conversion, de cette conversion qui n’est jamais achevée, qui est toujours à reprendre, qui dure autant que notre vie : arriver à ne faire qu’un avec Jésus-Christ. C’est le dernier mot de la vie chrétienne.

            Je propose donc à votre examen de conscience la place que l’intimité avec notre Seigneur tient dans votre vie. Recherchez si les défaillances que vous avez à vous reprocher, vos stagnations, vos reculs_ qui certes sont partiellement imputables à un relâchement de la volonté, à la crainte de l’effort_ n’ont pas leur cause initiale dans la négligence ou l’abandon de la prière. Si vous avez tant de peine à vous détacher du mal, n’est-ce pas parce que vous vous seriez détaché un peu de notre Seigneur ?

            Quelle place faites-vous à la prière chaque jour ? Est-elle suffisante ? Est-elle toujours respectée ? Votre prière du matin ! Le regard du prodigue sur les yeux de son père, avant de reprendre la tache du jour. Interrogez-vous sur la qualité de votre prière : est-elle vraiment un entretien cordial avec notre Seigneur ? Prenez-vous soin d’alimenter cet entretien par la lecture méditée de l’Evangile ?

            Peut-être vous plaignez-vous de votre peu de goût pour la prière ? En ce cas c’est votre foi elle-même qui est en jeu. Croyez-vous réellement que le Seigneur vous aime ? Alors ne vous occupez plus de vous ! Ne lui refusez pas ces quelques minutes d’intimité, même si votre cœur est froid, même si votre tête est vide, même si les mots vous manquent. Le Seigneur connaît vos difficultés. C’est lui qui vous appelle, c’est lui qui vous attend, chaque jour. Il a, lui, des choses à vous dire. « La divine bonté, écrit saint François de Sales, prend plus de plaisir à nous donner ces grâces que nous à les recevoir. »

            Le prodigue ne se doutait guère qu’il allait faire la joie de son père. Et nous oublions nous aussi que Dieu est heureux de nous voir venir à lui. C’est inconcevable, je vous l’accorde. Nous n’aurions pas pu inventer cette vérité si le Fils de Dieu n’était pas descendu du Ciel pour nous l’apprendre. Mais il nous l’a dit : Mon père vous aime.

            Quand vous vous signez le matin, quand vous vous agenouillez le soir, quand vous élevez votre pensée vers lui au milieu de la journée, quand vous faites un crochet pour faire une courte prière dans une église… Chaque fois vous le rendez heureux. Son enfant n’est pas perdu, son enfant n’est pas mort, son enfant est toujours avec lui.

            Je vous laisse sur cette vérité bouleversante, anéantissante : nous détenons le pouvoir invraisemblable de faire le bonheur de Dieu.

GEORGES CHEVROT , L’ENFANT PRODIGUE

15 mars 2009

Message de Benoît XVI pour le carême 2009 : Redécouvrir le sens chrétien de la pratique du jeûne

Chers frères et sœurs !

Au commencement du Carême, qui constitue un chemin d'entraînement spirituel intense, la Liturgie nous propose à nouveau trois pratiques pénitentielles très chères à la tradition biblique et chrétienne - la prière, l'aumône et le jeûne - pour nous préparer à mieux célébrer la Pâque et faire ainsi l'expérience de la puissance de Dieu qui, comme nous l'entendrons au cours de la Veillée Pascale, « triomphe du mal, lave nos fautes, redonne l'innocence aux pécheurs, la joie aux affligés, dissipe la haine, nous apporte la paix et humilie l'orgueil du monde » (Annonce de la Pâque).

En ce traditionnel Message du Carême, je souhaite cette année me pencher plus particulièrement sur la valeur et le sens du jeûne.

Le Carême en effet nous rappelle les quarante jours de jeûne vécus par le Seigneur dans le désert, avant le commencement de sa mission publique. Nous lisons dans l'Evangile : « Jésus fut conduit au désert par l'Esprit pour être tenté par le démon. Après avoir jeûné quarante jours et quarante nuits, il eut faim » (Mt 4,1-2). Comme Moïse avant de recevoir les Tables de la Loi, (cf. Ex 34,28), comme Élie avant de rencontrer le Seigneur sur le mont Horeb (cf. 1 R 19,8), de même Jésus, en priant et en jeûnant, se prépare à sa mission, dont le début fut marqué par une dure confrontation avec le tentateur.

Nous pouvons nous demander quelle valeur et quel sens peuvent avoir pour nous, chrétiens, le fait de se priver de quelque chose qui serait bon en soi et utile pour notre subsistance.

Les Saintes Écritures et toute la tradition chrétienne enseignent que le jeûne est d'un grand secours pour éviter le péché et tout ce qui conduit à lui.

C'est pourquoi, dans l'histoire du salut, l'invitation à jeûner revient régulièrement. Déjà dans les premières pages de la Sainte Écriture, le Seigneur commande à l'homme de s'abstenir de manger du fruit défendu : « Tu pourras manger de tous les arbres du jardin, mais de l'arbre de la connaissance du bien et du mal, tu ne mangera pas, car le jour où tu en mangeras, certainement tu mourras. » (Gn 2,16-17).

En commentant l'injonction divine, saint Basile observe que « le jeûne a été prescrit dans le paradis terrestre », et « ce premier précepte été donné à Adam ». Il conclut ainsi : « Cette défense - 'tu ne mangeras pas' - est une loi de jeûne et d'abstinence ».

Parce que tous nous sommes appesantis par le péché et ses conséquences, le jeûne nous est offert comme un moyen pour renouer notre amitié avec le Seigneur.

C'est ce que fit Esdras avant le voyage du retour de l'exil en Terre promise, quand il invita le peuple réuni à jeûner « pour s'humilier - dit-il - devant notre Dieu » (8,21). Le Tout Puissant écouta leur prière et les assura de sa faveur et de sa protection.

Les habitants de Ninive en firent autant quand, sensibles à l'appel de Jonas à la repentance, ils proclamèrent, comme témoignage de leur sincérité, un jeûne en disant: « Qui sait si Dieu ne se ravisera pas et ne se repentira pas, s'il ne reviendra pas de l'ardeur de sa colère, en sorte que nous ne périssions point ? » (3,9). Là encore, Dieu vit leurs œuvres et les épargna.

Dans le Nouveau Testament, Jésus met en lumière la raison profonde du jeûne en stigmatisant l'attitude des pharisiens qui observaient avec scrupule les prescriptions imposées par la loi, alors que leurs cœurs étaient loin de Dieu.

Le vrai jeûne, redit encore en d'autre lieux le divin Maître, consiste plutôt à faire la volonté du Père céleste, lequel « voit dans le secret et te récompensera » (Mt 6,18).

Lui-même en donne l'exemple en répondant à Satan, au terme des quarante jours passés dans le désert : « Ce n'est pas de pain seul que vivra l'homme, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu » (Mt 4,4). Le vrai jeûne a donc pour but de manger « la vraie nourriture », qui consiste à faire la volonté du Père (cf. Jn 4,34).

Si donc Adam désobéit à l'ordre du Seigneur « de ne pas manger du fruit de l'arbre de la connaissance du bien et du mal », le croyant entend par le jeûne se soumettre à Dieu avec humilité, en se confiant à sa bonté et à sa miséricorde.

La pratique du jeûne est très présente dans la première communauté chrétienne (cf. Act 13,3; 14,22; 27,21; 2 Cor 6,5). Les Pères de l'Église aussi parlent de la force du jeûne, capable de mettre un frein au péché, de réprimer les désirs du « vieil homme », et d'ouvrir dans le cœur du croyant le chemin vers Dieu.

Le jeûne est en outre une pratique récurrente des saints, qui le recommandent. Saint Pierre Chrysologue écrit : « Le jeûne est l'âme de la prière, la miséricorde est la vie du jeûne. Donc, celui qui prie doit jeûner ; celui qui jeûne doit avoir pitié ; qu'il écoute l'homme qui demande, et qui en demandant souhaite être écouté ; il se fait entendre de Dieu, celui qui ne refuse pas d'entendre lorsqu'on le supplie ».

De nos jours, la pratique du jeûne semble avoir perdu un peu de sa valeur spirituelle et, dans une culture marquée par la recherche du bien-être matériel, elle a plutôt pris la valeur d'une pratique thérapeutique pour le soin du corps.

Le jeûne est sans nul doute utile au bien-être physique, mais pour les croyants, il est en premier lieu une « thérapie » pour soigner tout ce qui les empêche de se conformer à la volonté de Dieu.

Dans la Constitution apostolique Pænitemini de 1966, le Serviteur de Dieu Paul VI reconnaissait la nécessité de remettre le jeûne dans le contexte de l'appel de tout chrétien à « ne plus vivre pour soi-même, mais pour Celui qui l'a aimé et s'est donné pour lui, et... aussi à vivre pour ses frères » (cf. Ch. I).
Ce Carême pourrait être l'occasion de reprendre les normes contenues dans cette Constitution apostolique, et de remettre en valeur la signification authentique et permanente de l'antique pratique pénitentielle, capable de nous aider à mortifier notre égoïsme et à ouvrir nos cœurs à l'amour de Dieu et du prochain, premier et suprême commandement de la Loi nouvelle et résumé de tout l'Évangile (cf. Mt 22,34-40).

La pratique fidèle du jeûne contribue en outre à l'unification de la personne humaine, corps et âme, en l'aidant à éviter le péché et à croître dans l'intimité du Seigneur. Saint Augustin qui connaissait bien ses inclinations négatives et les définissait comme « des nœuds tortueux et emmêlés » (Confessions, II, 10.18), écrivait dans son traité sur L'utilité du jeûne : « Je m'afflige certes un supplice, mais pour qu'Il me pardonne ; je me châtie de moi-même pour qu'Il m'aide, pour plaire à ses yeux, pour arriver à la délectation de sa douceur » . Se priver de nourriture matérielle qui alimente le corps facilite la disposition intérieur à l'écoute du Christ et à se nourrir de sa parole de salut. Avec le jeûne et la prière, nous Lui permettons de venir rassasier une faim plus profonde que nous expérimentons au plus intime de nous : la faim et la soif de Dieu.


En même temps, le jeûne nous aide à prendre conscience de la situation dans laquelle vivent tant de nos frères. Dans sa Première Lettre, saint Jean met en garde : « Si quelqu'un possède des richesses de ce monde et, voyant son frère dans la nécessité, lui ferme ses entrailles, comment l'amour de Dieu demeurerait-il en lui ? » (3,17).

Jeûner volontairement nous aide à suivre l'exemple du Bon Samaritain, qui se penche et va au secours du frère qui souffre (cf. Deus caritas est, 15). En choisissant librement de se priver de quelque chose pour aider les autres, nous montrons de manière concrète que le prochain en difficulté ne nous est pas étranger.

C'est précisément pour maintenir vivante cette attitude d'accueil et d'attention à l'égard de nos frères que j'encourage les paroisses et toutes les communautés à intensifier pendant le Carême la pratique du jeûne personnel et communautaire, en cultivant aussi l'écoute de la Parole de Dieu, la prière et l'aumône. Ceci a été, dès le début, une caractéristique de la vie des communautés chrétiennes où se faisaient des collectes spéciales (cf. 2 Cor 8-9; Rm 15, 25-27), tandis que les fidèles étaient invités à donner aux pauvres ce qui, grâce au jeûne, avait été mis à part (cf. Didascalie Ap., V, 20,18). Même aujourd'hui, une telle pratique doit être redécouverte et encouragée, surtout pendant le temps liturgique du Carême.

Il ressort clairement de tout ce que je viens de dire, que le jeûne représente une pratique ascétique importante, une arme spirituelle pour lutter contre tous les attachements désordonnés.

Se priver volontairement du plaisir de la nourriture et d'autres biens matériels, aide le disciple du Christ à contrôler les appétits de sa nature affaiblie par la faute originelle, et dont les effets négatifs investissent entièrement la personne humaine.

Une hymne antique de la liturgie du Carême exhorte avec pertinence : « Utamur ergo parcius, / verbis, cibis et potibus, / somno, iocis et arctius / perstemus in custodia –
Nous utilisons plus sobrement les paroles, les nourritures, les boissons, le sommeil et les jeux, et avec plus d'attention, nous demeurons vigilants ».

Chers frères et sœurs, à bien regarder, le jeûne a comme ultime finalité d'aider chacun d'entre nous, comme l'écrivait le Serviteur de Dieu Jean-Paul II, à faire un don total de soi à Dieu (cf. Veritatis splendor, 21).

Que le Carême soit donc mis en valeur dans toutes les familles et dans toutes les communautés chrétiennes, pour éloigner de tout ce qui distrait l'esprit et intensifier ce qui nourrit l'âme en l'ouvrant à l'amour de Dieu et du prochain.

Je pense en particulier à un plus grand engagement dans la prière, la lectio divina, le recours au Sacrement de la Réconciliation et dans la participation active à l'Eucharistie, par dessus tout à la Messe dominicale.

Avec cette disposition intérieure, nous entrons dans le climat de pénitence propre au Carême.

Que la Bienheureuse Vierge Marie, Causa nostrae laetitiae nous accompagne et nous soutienne dans nos efforts pour libérer notre cœur de l'esclavage du péché et pour en faire toujours plus un « tabernacle vivant de Dieu ».

En formulant ce souhait et en assurant de ma prière tous les croyants et chaque communauté ecclésiale afin que tous suivent avec profit l'itinéraire du Carême, j'accorde à tous et de tout cœur la Bénédiction Apostolique.

Du Vatican, le 11 décembre 2008
BENEDICTUS PP. XVI

11 mars 2009

VERITE ET LIBERTE

Voici l’extrait de la lettre encyclique de Jean-Paul II que j’ai beaucoup aimée et que je vous convie à la  lecture.

LA SPLENDEUR DE LA VERITE se reflète dans toutes les œuvres du Créateur et, d’une manière particulière, dans l’homme créé à l’image et à la ressemblance de Dieu (cf Gn 1,26) : la vérité éclaire l’intelligence et donne sa forme à la liberté de l’homme, qui, de cette façon, est amené à connaître et à aimer le Seigneur. C’est dans ce sens que prie le psalmiste : « Fais lever sur nous la lumière de ta face » (Ps 4,7).

Appelés au salut par la foi en Jésus Christ, « lumière véritable qui éclaire tout homme » (Jn 1,9), les hommes deviennent « lumière dans le Seigneur » et « enfants de la lumière » (Ep 5,8), et ils se sanctifient par « l’obéissance à la vérité » (1 P 1,22).

L’ACTE MORAL

La relation entre la liberté de l’homme et la Loi de Dieu, qui se réalise de façon  profonde et vivante dans la conscience morale, se manifeste et se concrétise dans les actes humains. C’est précisément par ses actes que l’homme se perfectionne en tant qu’homme, appelé à chercher spontanément son Créateur et à atteindre, en adhérant à la lui librement, la pleine et bienheureuse perfection.

Les actes humains sont des actes moraux parce qu’ils expriment et déterminent la bonté ou la malice de l’homme qui les accomplit. Ils ne produisent pas seulement un changement d’état d’éléments extérieurs à l’homme, mais, en tant que délibérément choisis, ils qualifient moralement la personne qui les accomplit et ils en expriment la physionomie profonde, comme le note de façon suggestive saint Grégoire de Nysse : « Tous les êtres soumis au devenir ne demeurent jamais identiques à eux-mêmes, mais ils passent continuellement d’un état à un autre par un changement qui opère toujours en bien ou en mal […]. Or, être sujet au changement, c’est naître continuellement […]. Mais ici la naissance ne vient pas d’une intervention étrangère, comme c’est le cas pour les êtres corporels […]. Elle est le résultat d’un choix libre et nous sommes ainsi, en un sens, nos propres parents, nous créant nous-mêmes tels que nous voulons être, et, par notre volonté, nous façonnant selon le modèle que nous choisissons ».

La moralité des actes est définie par la relation entre la liberté de l’homme et le bien authentique. Ce bien est établi comme Loi éternelle, par la Sagesse de Dieu qui ordonne tout être à sa fin : cette Loi éternelle est connue autant grâce à la raison naturelle de l’homme (et ainsi, elle est « loi naturelle »), que, de manière intégrale et parfaite, grâce à la révélation surnaturelle de Dieu (elle est alors appelée « Loi divine »). L’agir est moralement bon quand les choix libres sont conformes au vrai bien de l’homme et manifestent ainsi l’orientation volontaire de la personne vers sa fin ultime, à savoir Dieu lui-même : le bien suprême, dans lequel l’homme trouve son bonheur plénier et parfait. La question initiale du dialogue entre le jeune homme et Jésus : « Que dois-je faire de bon pour avoir la vie éternelle ? » (Mt 19,16) met immédiatement en évidence le lien essentiel entre la valeur d’un acte et la fin ultime de l’homme. Dans sa réponse, Jésus corrobore la conviction de son interlocuteur : l’accomplissement d’actes bons, exigés par Celui qui « seul est bon », constitue la condition indispensable et la voie de la béatitude éternelle : « Si tu veux entrer dans la vie, observe les commandements » (Mt 19,17). La réponse de Jésus et la référence aux commandements manifestent aussi que la voie qui mène à cette fin est marquée par le respect des lois divines qui sauvegardent le bien humain. Seul l’acte conforme au bien peut être la voie qui conduit à la vie.

Ordonner rationnellement l’acte humain vers le bien dans sa vérité et rechercher volontairement ce bien, appréhendé par la raison, cela constitue la moralité. Par conséquent, l’agir humain ne peut pas être estimé moralement bon seulement parce qu’il convient pour atteindre tel ou tel but recherché, ou simplement parce que l’intention du sujet est bonne. L’agir est moralement bon lorsqu’il indique et manifeste que la personne s’ordonne volontairement à sa fin ultime et que l’action concrète est conforme au bien humain tel qu’il est reconnu dans sa vérité par la raison. Si l’objet de l’action concrète n’est pas en harmonie avec le vrai bien de la personne, le choix de cette action rend notre volonté et notre être même moralement mauvais et il nous met donc en contradiction avec notre fin ultime, le Bien suprême, à savoir Dieu lui-même.

JEAN-PAUL II, Veritatis Splendor

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